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#23

Quand les fourmis ont besoin des cigales

24/02

Podcast numéro 23
Dans une économie marchande les fourmis ont besoin des cigales !

Amandine : Bonjour JC comment ca va ?
JC : Bonjour Amandine, ça va mais j ai besoin de soleil et de vacances.

JC :
Alors il ne t'a pas échappé que les élections présidentielles de cette année sont un peu particulières. Après 2 ans de pandémie, une des questions qui ne se pose pas en dehors de l'inflation c'est la dette et du quoi qu'il en coûte.

En vérité, c'est un sujet peu abordé par les candidats de gauche ou de droite trop occupé à surenchérir sur de nouvelles dépenses liées au revenu minimum, à l'impôt, à la transition écologique et à des postes de dépenses pour lesquels d'ailleurs ils sont d'une discrétion de violette quant à leur financement.

Et quand le sujet est abordé, chacun y va de ses prédictions funestes pour les 30 prochaines années de remboursement d’une dette jugée insupportable. Cette économie de la dette a fait l'objet de travaux extrêmement intéressant de 3 chercheurs Anton Bredner, Florence Pisani et Emile Gagna qui remettent complétement en cause cette approche.

Amandine :
Il faut se souvenir que l'épargne est presque partout perçue comme une vertu et la dette comme une faute. L'islam proscrit toujours le prêt à intérêt, l'église après de longues hésitations l'a permis si son taux n'est pas usuraire. En allemand, le même mot désigne la dette et la faute. En anglais, le même verbe désigne le remboursement d'une dette et le rachat d'un péché. Dans les économies modernes depuis 30 ans épargne et endettement sont pourtant devenus indissociables. La montée des dettes que l'on observe dans les sociétés dont le niveau de vie progresse est en fait l'autre face de l'accumulation d'épargne qui s'y déroule.


JC : Mais le lien entre dette et richesse est devenu opaque. Car entre les prêteurs et les emprunteurs des systèmes financiers s’interposent ce qui rend cette relation plus difficile à percevoir. D'un côté des institutions financières prêtent une épargne qui n'est pas la leur, de l'autre les ménages placent l'argent qu'ils épargnent sans avoir le sentiment le plus souvent de le prêter.


Amandine : mais du coup comme la dette liée au COVID a bondi dans la plupart des états occidentaux, nos états vont-ils faire faillite ? qui va payer ? Il semblerait qu’il ne faille pas accepter cette fatalité de la montée de l'endettement mais tirer parti des possibilités qu'ils ouvrent en essayant d'en maîtriser les risques.


JC : En effet, si l'endettement est une source récurrente de crise, il n'en est pas moins indispensable à l'expansion de l'activité économique. La raison en est simple : les dettes des uns, ce sont les créances des autres !!! dit autrement lorsque l'économie se développe, les ménages épargnent, et pour une large part cette épargne conduit à une accumulation de créance même si personne ne s'en doute. A l’inverse personne non plus ne peut mettre de l'argent de côté si l'activité stagne ou pire si elle se contracte.
On peut résumer ça en une phrase, dans une économie marchande les fourmis ont besoin de cigales.


Amandine : Le bond spectaculaire de l'endettement des états a ravivé le débat sur les limites de la dette publique, le fait est que certains états jugé hier au bord de la faillite aient pu mobiliser sans problème des sommes considérables. Tout cela n’a pas manqué d'ébranler quelques idées reçues.


JC : L’état a une double particularité. A la différence des agents privés, il est éternel et il a la possibilité de décider non seulement du montant de ses dépenses mais aussi de celui de ses ressources.


Amandine : A la différence d'un ménage, un état ne doit pas obligatoirement rembourser sa dette. Plus précisément, il peut année après année rembourser ses dettes passées en empruntant à nouveau mais si tel est durablement le cas, sa dette augmentera constamment et sa dynamique peut devenir incontrôlable.
Dans son rôle d'emprunteur du dernier ressort, l'état doit se laisser guider par les indications données par la politique des Banque centrale, car ces dernière ont pour mission d'apprécier la distance qui sépare l'économie du plein emploi.


JC : L’état dans les économies avancées joue aussi la pandémie vient de le rappeler un rôle d'assureur en dernier ressort.
Cette fonction peut être source demain de dépenses auxquelles l'état devra faire face quoi qu'il advienne.
Il lui faut donc aussi en permanence utiliser les ressources que l’état mobilise par l'impôt ou par l'emprunt pour réduire autant que possible les limites auxquelles ce rôle d'assureur l'expose.
Investir pour limiter les conséquences des risques catastrophiques à défaut de pouvoir les prévenir s'inscrit dans cette logique. Mais il y a aussi la compétition internationale et le progrès technique par exemple. Anticiper le jeu de ces forces est essentiel pour rendre un système d'éducation et une formation plus efficace et permettre à ceux qui arriveront demain sur le marché du travail d’être plus qualifiés et de trouver un emploi.


Amandine : En conclusion, il y a eu un étonnant changement d'attitude des gouvernements face à la politique budgétaire suite à la pandémie. D'une part et de l'autre de l'Atlantique les États jusque-là réticents à dépenser plus ont décidé d'investir des centaines de milliards pour moderniser les infrastructures leurs économies et pour répondre à l'urgence climatique et sanitaire.

À l'issue du G 7 qui s'est tenu au printemps 2021, l'idée que les entreprises les plus profitables devaient payer leur juste part de l'impôt et que la croissance devrait être plus inclusive ont fait l'objet d'un accord unanime.


Il aura fallu plusieurs décennies aux banques centrales des pays avancés pour apprendre à manier le levier des taux d'intérêt. tirer parti de l'épargne qui s'accumulent pour faire face aux problèmes auxquels leur pays sont confrontés exigera des états qu'ils apprennent à leur tour à manier plus habilement les leviers budgétaires. Quand on dépense beaucoup dépenser bien n'est pas facile.


Pour éviter de gâcher les ressources qu’ils mobilisent, les États vont devoir surmonter l'inertie des habitudes et la résistance naturelle des intérêts en place. Et si il y parviennent ils ne feront pas faillite.

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